leur carte
Avec son titre fétiche "Premier Gaou", Magic System a conquis trois ans après sa sortie le public français. Entre temps le groupe ivoirien avait été en tête des hits-parades africains et antillais. Du jamais vu depuis "Yeke Yeke".
Originaire du quartier populaire de Marcory à Abidjan, le groupe Magic System se forme en 1996 et est composé de Asalfo, Goudé, Tino et Manadja. Cette bande s’est constituée au cours des compétitions scolaires et sportives, creuset de l’essentiel des groupes de jeunes qui ont essaimé ces dernières années dans les quartiers chauds de la capitale ivoirienne.
Ils se distinguent d’abord dans l’animation des manifestations locales et forts de leur succès, décident de se lancer dans une carrière professionnelle. Jusque-là, leur ambition est de se frayer une place sous les projecteurs de la scène musicale du pays et surtout, améliorer un quotidien fait de précarité et d’incertitudes.
Baptisé Magic System, le groupe sort un premier album à la fin de l’année 1997 grâce au concours de Claude Bassolet, un dénicheur de talents bien connu de la place abidjanaise. Ce dernier décide en effet de lui donner une chance. Le titre "Momo", premier extrait de l’album "Papitou", est un titre à succès qui tourne sur toutes les ondes radio du pays. Leurs sonorités traditionnelles teintées de synthés mettent en relief la voix magnifique du chanteur principal Asalfo. "Momo" séduit les mélomanes et les disc-jockeys le diffusent en boucle au bonheur des fêtards.
Malheureusement le succès commercial n’est pas au rendez-vous et le groupe connaît une traversée du désert. Mais il en faut un peu plus pour entamer l’enthousiasme de ces garçons résolus à poursuivre l’aventure. Ils se mettent en quête d’un nouveau producteur avec pour argument une maquette qui ne semble pas produire l’effet escompté. De guerre lasse, ils se tournent vers leur manager Angelo Kabila. Magic System devient ainsi le premier groupe de la société Show Box International créée pour les besoins de la cause.
Premier gaou
Au printemps 1999, Magic System entre au studio Soft, une structure techniquement en mesure de rivaliser avec les studios les plus performants d’Afrique de l’Ouest. Ils enregistrent alors les titres de l’album événement "1er Gaou".
Au total, huit chansons qui traitent des thèmes inspirés par leur environnement socio-culturel. Des histoires simples racontées par la voix chaleureuse d’Asalfo, comme ce "1er Gaou" chronique d’un amant qui refuse de jouer les "gnata", aux dépens de sa petite amie très sensible au volume du porte-monnaie. Les pratiques pédophiles de plus en plus courantes dans les centres urbains sont stigmatisées dans "Complainte". De même que des problèmes brûlants d’actualité comme les divisions ethniques ("Mi wan gno"), l’avortement ("Pourquoi ça"), la délinquance juvénile ou encore les vertus de la tradition dans "Amoulanga".
A court de ressources financières, ils relancent les démarches auprès des maisons de distribution qui ne manifestent pas un grand empressement à sortir l’album. Après plusieurs hésitations, le groupe est signé par l’écurie Showbiz. Nous sommes en automne 1999 et la sortie de l’album produit un résultat spectaculaire. Plus de 40.000 cassettes sont vendues en deux semaines, le titre "1er Gaou" devient un tube et un succès commercial.
Le succès
C’est la partition de l’amour par intérêt, thème récurrent et classique mais traité ici avec un humour et un enthousiasme peu ordinaires. Un titre justement servi par une rythmique simple, efficace et entraînante. Après l’Afrique de l’Ouest, la vague Magic System atteint tous les autres centres urbains du continent africain. Avec près de 300.000 cassettes vendues dans leur pays et plus d’un million dans le reste du continent, le groupe se taille une belle réputation. Toutes les capitales les sollicitent et le tube a même du succès dans les boîtes de nuit de… Tunis. On parle désormais du phénomène Magic System.
Bientôt, ce sont les bords de la Seine qui sont touchés. Distribué en France par Next Music, la progression des ventes de l’album est fulgurante et pendant plusieurs mois, le réseau des magasins FNAC déclare Magic System comme meilleure vente de sa rubrique musique africaine. La barre des 30.000 CDs vendus est aujourd’hui franchie.
Il faut remonter au milieu des années 80, au cœur de l’âge d’or des musiques africaines en France, pour retrouver un tel exploit par un jeune groupe dont c’était la première sortie sur le marché hexagonal. Un engouement qui s’est à peine atténué près de deux ans après la sortie de cet opus. Bien au contraire le groupe est allé à l’assaut d’autres villes de provinces en France mais aussi en Belgique, en Suisse et en Italie, en réussissant à chaque étape à fédérer un public dont la base déborde de leur "clientèle" naturelle.
Des artistes et groupes de renom comme Koffi Olomidé ou le collectif Bisso na Bisso emmené par le rappeur Passi les invitent pour des collaborations sur scène, à Bercy notamment. Le 14 avril 2001, le Magic System invite leurs fans au Zénith de Paris en compagnie de Jocelyne Labylle, Claudy Siar, les Garagistes et Koffi Olomidé pour célébrer leur succès en France. L’essai est transformé. Le plus surprenant est venu des Caraïbes où le Magic System a connu plus qu’un succès d’estime en vendant plus de cinq mille CDs et attirant des foules là où certains artistes africains de renom ont essuyé des échecs à répétition.
En juin 2001, "Poisson d’avril" le nouvel album de Magic System sort chez JPS Productions. Pour tenter de convertir la vague Gaou encore bien haute en un deuxième succès, les quatre garçons d’Abidjan ont invité la célèbre chanteuse sud-africaine Brenda Fassie dans le titre "Kodjo Kodjo Tiré". Ce nouvel album compte huit titres dont "Poisson d’avril", encore une histoire de couple qui tourne mal. Rythmiquement aussi, la recette n’a pas beaucoup changé. L’accueil du public reste mesuré au moment où on annonce une version techno du titre "1er Gaou" mixé par le DJ français Bob Sinclar. Autant dire que la saga "Gaou " continue.
C'est grâce à cette nouvelle version que durant l'été 2002 les radios FM françaises découvrent enfin le groupe ivoirien. Le single "Premier Gaou" arrive en troisième position des ventes à l'automne, phénomème qui n'avait pas été vu depuis quinze ans, à l'époque du "Yéké Yéké" de Mory Kante. Un grand concert est prévu le 1er décembre à l'Olympia pour réunir les nouveaux gaouphiles.
Novembre 2002